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8 juin 2013 6 08 /06 /juin /2013 11:12

Archives : réédition d'un article (le premier!) disparu lors de la mise à jour du blog.

 

Nom d'auteur : le nom.

 

Gilles PIAZO est né il y a un peu plus de deux ans maintenant, au bas de son premier vrai texte : une nouvelle avec un début un milieu une fin en vue d'un concours dans l'ouest de la France. Non retenue pour le palmarès.

Du coup, il ne se rappelle plus exactement quelle bibliothèque de quelle région ou ville l'organisait, le concours. Et moi non plus d'ailleurs. Même si l'on avait tous deux quand même examiné la carte de France via google, au cas où une annonce de distinction avait surgie d'une enveloppe quelques mois plus tard et qu'il avait fallu nous rendre à la cérémonie de remise des prix.

Enfin j'aligne les "on", les "nous" pour la petite histoire ; mais c'est bien plutôt et vous l'aviez compris dès l'entame de moi-même qu'il s'agit en lui. De moi tout court, ou presque. De moi qui vous écris. De moi qui essaie d'écrire ; de creuser.

De moi embarqué depuis ce jour dans un devenir rat. De moi en train de donner au bas de ces premières pages et sans même m'en rendre véritablement compte à mon terrier et dans la glaise du réel qu'il a vocation de parcourir le premier coup de patte.

De moi comme d'un double, toujours positionné à la lisière floue de moi-même.

Fallait signer par un pseudo, vous savez bien comment ça marche ; question d'anonymat des copies.

Et puis je m'y suis tout de suite senti bien. 

D'une part parce que mon nom, le "vrai", outre qu'il n'a finalement et par son usage social pas grand chose à voir avec cette partie de ma personnalité qui déverse, est définitivement imprononçable au premier abord ; tout le monde se plante, tout le monde écorche, tout le monde ampute ou défigure, à l'écrit tout aussi bien. Il faut statistiquement des semaines, voire des mois à une personne normale pour s'en souvenir précisément et l'orthographier correctement.

C'est pas compliqué : chaque fois qu'un prof s'arrêtait net lors du premier appel de l'année, des syllabes avortées s'accumulant en cascade dans sa bouche et faisant se tordre ses lèvres dans une mimique de trop plein; chaque fois qu'une pauvre standardiste creuse un brusque silence dans le combiné, perdue dans le flou de la combinaison phonétique qui vient de lui parvenir et, par un "Comment?" tardif, réclame une deuxième chance, vous pouvez être sûr que c'est sur moi que ça coince. A 80% au moins. 

Tant et si bien que j'ai très vite su l'épeler, ce nom, égrener sans hésitation son chapelet de huit lettres. Peut-être même avant de savoir le prononcer... D'ailleurs aujourd'hui encore je commence souvent par là, épeler. Sans même prendre le risque de. 

Alors si pour une fois et dans un domaine je pouvais m'en passer...

Parce qu'aussi - et peut-être surtout - je me suis rapidement rendu compte qu'il me permettrait d'exister enfin dans une fine franche jusque-là inaccessible de mon histoire ; du côté maternel. Là précisément où j'étais aller le piocher. Du côté de ces êtres que l'on a côtoyés et aimés - ses parents à elle - sans jamais pouvoir nous rapprocher totalement d'eux, dépasser la barrière irréductible de la différence du nom.

En porter un autre, c'était comme à jamais garder une part d'étrangeté, plutôt au sens d'étranger ; comme ne jamais pouvoir se sentir entièrement identiques, entièrement de la même souche.

Gamin, il est des fois sans doute où m'a tiraillé le désir d'en changer. Non par refus ou aversion à l'égard de celui qui m'était donné, mais bien plus par volonté d'empoigner d'une histoire qui en droit m'appartenait mais dont un mince filet semblait néanmoins - en fait et dans cet écart infranchissable du patronyme - toujours s'écouler liquide entre mes doigts.

Alors je l'ai gardé ; peut-être aussi pour d'autres raisons, encore obscures ou non avouables.

Comme on garde une vieille photo de famille jaunie.

Comme on enfile un uniforme pour aller chaque jour creuser son sillon devant son écran d'ordinateur, maintenant un pied de chaque côté de mon origine.

Un rat en uniforme.

Un uniforme de rat.

 

 

En exergue et parce qu'il faut bien commencer...
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22 mars 2012 4 22 /03 /mars /2012 10:27

 

Construire l'intime.

 

N'ai jamais tenu de Journal.

Ou alors de manière très irrégulière, avec des phases très courtes de fonctionnement.

Peut-être parce qu'écrire sur moi-même, en cercle fermé, ne m'a jamais vraiment intéressé. Et la session "En Vrac" ouverte à cet effet sous windows ne compte que quelques menues unités A4 clairsemées pour plus de deux ans d'existence et beaucoup plus de pages écrites dans d'autres dépendances parallèles du système.

Peut-être aussi parce que la fiction seule aimante mes mots et qu'une fiction pour soi-même ne mérite pas l'effort qu'on y consacre, ne se légitime pas suffisamment pour que l'on puisse trouver la force de l'entreprendre.

Peut-être parce que notre petite histoire à nous, notre petite affaire privée ça ne concerne finalement pas grand monde, pas même nous-mêmes. Par-delà ce que l'on veut à toute force nous faire croire : que là est notre force, notre réel potentiel, notre pouvoir de visibilité, de buzz, notre devenir star.

Paradoxal web, tête de Janus : en même temps supermarché du Moi (bien plus que la télé, c'est dire... Et pourtant les émissions sur sur ma vie, mes goûts, mes confidences, mes petits problèmes et mes gros soucis, combien sur chaque chaîne...?), autel à la gloire de l'exhibition et de l'intimité livrée brute à la surface de l'écran et possibilité même, par le vecteur qu'il représente, de prendre la parole pour tenter de s'en construire à soi-même une nouvelle, branchée sur les évènements de pensée qui le traversent.

Une intimité de rat ; de discours, de langue.

Et bien sûr exit les filtres culturels préexistants qui rendaient l'entreprise hasardeuse, réservée aux quelques happy-few qui passaient entre les mailles du filet culturel. Plus besoin d'être édité pour être lisible alors pour celui sur qui ça tombe, ce besoin inexplicable de piocher dans la langue, avoir la liberté d'assouvir son désir d'écrire sous une forme nouvelle, quelque soit le moment de sa vie où il accède à l'efficience.

Pour mon compte relativement tard et il n'y a pas si longtemps.

Pas étonnant alors que j'enfonce comme cela des portes grandes ouvertes. Que je commence à peine à mâcher des théories digérées depuis des lustres, des trucs que tout le monde sait et que beaucoup pratiquent depuis des années mais qui m'apparaissent néanmoins comme des vérités neuves, des perspectives inédites qui, dépourvu que j'étais de cette présence à mes côtés de l'écrit, ne me concernaient pas, ou de très loin. Pas intimement. Pas comme aujourd'hui.

Débuter : accepter d'emboîter le pas et de s'extasier bêtement devant la beauté restée vierge de sentiers par d'autres mille fois foulés.

Alors après deux grosses années et la pratique solidement ancrée en moi comme une sale habitude, voilà que je bifurque vers le blog : vers la possibilité de construire une pensée, une fiction qui pourrait aller plus loin qu'elle n'irait dans la seule perspective éditoriale, la seule réalisation de textes embrassant, parfois dans notre dos comme une pensée de derrière la tête, un certains nombre de canons, normes et contraintes. Même si j'espère que ça continuera à rester une part importante du travail. Et même si l'édition numérique ouvre aujourd'hui encore plus la porte à l'insolite, encourage peut-être comme jamais l'invention et la liberté formelle. 

Pas pour rien qu'on publie traditionnellement les Journaux, les Lettres et que pour un auteur que l'on aime, c'est parfois un régal et une part accrue d'épaisseur lovée au coeur de la trace que nous gardons de ses textes.

Parce que tout Journal, toute activité épistolaire soutenue penche à un moment nécessairement du côté de la fiction et qu'il n'y a pas, dans l'acte d'écrire, quelque chose qui relèverait de la littérature et quelque chose qui, dans la langue, lui échapperait entièrement. Chaque phrase est grain de sable d'un tiers monde en devenir, d'un désert en devenir, rouage indispensable au fonctionnement global de la machine d'écriture.

Boite à fictions donc ; ce blog comme le reste. Et sans prétention autre que d'être partie de la construction d'un discours intime motivée par sa diffusion potentielle. 

Des fictions ; mais pas du faux, pas des mensonges. Bien plutôt par-ci par-là peut-être - et par l'un(e) ou l'autre d'entre vous pêchés dans le tas comme à la ligne - porteuses de quelques effets de vérité.

Pas de révélations brutes non plus mais des témoins d'activité, des seuils d'intensité ça et là greffés au grand réseau numérique, bouteilles à la mer du web ; autour de ce que je souhaiterais plus profondément comprendre de ma démarche balbutiante, de ce qui se présentera devant moi comme matériau épars ou interrogations à traiter pour construire, continuer à creuser et autant que faire se peut les différentes galeries de mon terrier.

Un relais, aussi : miroir du boulot réalisé par ailleurs avec les textes proposés aux éditeurs et qui auront la chance d'être acceptés ( un déjà, Roman, en 100% numérique avec Numeriklivres ; normalement c'est pour bientôt... Une nouvelle aussi, dans le prochain numéro de la revue Rue Saint Ambroise ; à paraître en mai...)

Alors à ce titre et en même temps que partie, lieu de la médiation entre ces deux versants d'une tentative d'invention de soi.

En dernier recours aussi famille d'accueil pour les pages qui finalement resteront orphelines, usées de cogner leurs phalanges meurtries aux bois des portes closes.

 

 

 

Boite à fictions.
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